2 juin 2018

Émilie LAVIGNE

Je cite:

«Née à St-Placide, comté des Deux-Montagnes, le 20 août 1889, d'une famille de 17 enfants, elle quittait le monde pour se donner à Dieu dès l'âge de 17 ans, le 10 septembre 1906. Ses bons parents, Osias Lavigne et Cécile Giroux, soucieux d'élever leurs
enfants dans la pratique des vertus chrétiennes, ne négligèrent rien pour arriver à ce but: aussi quand la jeune Émilie leur fit part de son attrait pour la vie religieuse, dans une Communauté de Charité, n'eut-elle pas depeine à obtenir leurconsentement unanime, considérant à la lumière de la foi que Dieu leur faisait une grande faveur en appelant une de leurs filles à son service. Cet heureux privilège devait se répéter quelques années plus tard dans la personne d'une des soeurs d'Émilie, Soeur Lavigne, des Soeurs Grises de Montréal, qui n'ayant pû persévérer à notre Providence pour défaut de santé, fut plus heureuse dans un autre essai et se voua, comme son ainée, aux oeuvres de la charité

À peine notre bonne soeur Joseph-Gabriel venait-elle de se consacrer à Dieu par les voeux de religion - 24 mars 1908 - que l'obéissance la désignait pour la mission sauvage de Lac Esturgeon, au Territoire du Nord-Ouest. Elle y passa les cinq premières années de sa vie religieuse et y remplit les fonctions obscures, mais doublement méritoires de cuisinière, dépensière, boulangère, à l'exception de la dernière année, où elle fut employée auprès des petits garçons de la mission, avec, en plus, la buanderie. Ces différents travaux toujours pénibles en eux-mêmes, l'étaient bien davantage dans une fondation comptant à peine deux années d'existence, et manquant d'accessoires pour l'exécution de tel ou tel emploi. Mais notre chère soeur n'en sentait guère la peine; elle eût voulu se sacrifier encore davantage pour le salut des âmes.

Cependant ses forces s'épuisaient et ses supérieures majeures durent la rappeler pour l'Hôpital Saint-Jean-de-Dieu où elle passa les 12 dernières années de sa carrière religieuse, à des emplois mieux proportionnés à ses forces: soin des malades à l'infirmerie des soeurs, compagne de la dépensière durant six années consécutives, après lesquelles la maladiel'obligera à des repos intermittents et lui fera remplir de petits offices, ça et là, jusqu'à ce que la souffrance devenue intolérable, nécessitera un repos complet.

Mais avant d'arriver à cette dernière phase de son existence, arrêtons-nous aux vertus que cette chère soeur a pratiquées d'une façon si admirable et dont le souvenir doit nous être précieux. Partout et toujours, disent les soeurs qui ont vécu dans son milieu, Soeur Joseph-Gabriel a manifesté la bonté de son coeur, son amour pour les pauvres et les malades, sa condescendance aimable et prévenante, son bon accueil pour tous. Nous avons déjà dit ce qu'était son amour pour le travail, ajoutons que rien ne lui coûtait pour rendre service et, par ses prévenances, elle allait même au-devant des désirs de ses officières à l'égard desquelles notre bonne soeur se montra toujours humble, soumise et d'humeur égale au milieu des contrariétés.

Sa piété, autre forme de son dévouement, lui faisait pratiquer la règle avec amour, sachant mettre de côté sa satisfaction personnelle quand il s'agissait du devoir à accomplir. C'est ainsi qu'un soir, une de ses parentes, religieuse, voulant luiparler, notre soeur lui fit remarquer que l'heure de la récréation étant passée, il n'était pas permis d'enfreindre le silence, et la pria d'attendre au lendemain.

Charitable dans ses conversations, elle s'observait si bien dès qu'elle s'apercevait de la moindre infraction, elle s'empressait de désavouer sa faute en déclarant sa culpabilité.

Reconnaisante pour ses supérieures et ses officières, elle n'avait garde d'oublier celle qui fut la première, en mission, à la guider dans les voies de la mission St-François-Xavier, à qui elle écrivait, chaque année, à l'époque de sa fête patronale,pour lui renouveler sa reconnaissance et le bon souvenir qu'elle conservait de sa première mission au Lac Esturgeon.

Sa tendre dévotion à la Sainte Vierge n'excluait pas celle qu'elle portait au chef de la sainte famille, devenu son patron, et qu'elle honorait de sa confiance. Aussi peut-on attribuer à ces augustes protecteurs l'assistance marquée qu'elle en reçut à ses dernièrs moments.

Dieu qui compte nos jours ici-bas et qui considère plus la valeur que le nombre de nos oeuvres, avait résolu d'appeler à lui sa fidèle servante. Atteinte depuis longtemps d'une maladie que le traitement médical n'avait pû vaincre, elle décida, endernier ressort, de se soumettre à l'opération chirurgicale, qu'elle subit le 14 avril 1925. Malheureusement, ce moyen extrême n'eut pas le succès espéré, car il suvint de graves complications qui enlevèrent tout espoir. Le premier mai au soir, la malade revenue à notre hôpital, demanda et reçut, la sainte communion avec une émotion visible. La nuit qui suivit fut des plus souffrantes, mais le lendemain, elle exprima de nouveau son ardent désir de communier en même temps que les autres malades. La supérieure s'étant rendue auprès d'elle l'aida à sa préparation, lui fit renouveler ses voeux et sa profession de foi. À peine eut-elle reçu son Viatique céleste, qu'elle demeura immobile et comme dans la contemplation d'un objet cher qu'elle embrasssait de son regard tendre et recueilli.

L'heure suprême approchait où notre chère soeur allait s'unir pour jamais à l'Epoux des Vierges. La messe était finie et le déjeuner des soeurs à peine commencé, quand on vint avertir la supérieure que la malade touchait à sa fin. Quelques minutes plus tard, elle expirait si doucement que c'est à peinesi nous avons pu saisir son dernier soupir. Nous regrettions que sa soeur, religieuse des Soeurs Grises, ne fût pas présente à ce moment, elle qui, auparavant, avait passé quelques jours auprès de cette chère soeur à qui elle était si attachée.

Les pieux parents assistèrent à son service qui eut lieu le 4 mai. Tous deux ne cessaient d'exprimer leur reconnaisance à notre supérieure pour les soins prodigués à leur chère enfant. Ils trouvèrent maintenant leur consalation dans la pensée quecelle qui s'est donnée tout entière à Dieu au printemps de sa vie, aura reçu un accueil favorable du Souverain Juge au moment de sa mort. Tel est aussi le sentiment de ceux et celles qu'elle a laissés ici-bas et qui la retrouveront au ciel!

Qu'elle repose à jamais dans la paix du Seigneur».





Reproduit intégralement du Petit Journal de la Providence, Vol XXII, 1925, 24ème année
(pp 467-473)

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