Je cite:
«Née
à St-Placide, comté des Deux-Montagnes, le 20 août 1889, d'une famille
de 17 enfants, elle quittait le monde pour se donner à Dieu dès l'âge
de 17 ans, le 10 septembre 1906. Ses bons parents, Osias Lavigne et
Cécile Giroux, soucieux d'élever leurs
enfants dans la pratique
des vertus chrétiennes, ne négligèrent rien pour arriver à ce but: aussi
quand la jeune Émilie leur fit part de son attrait pour la vie
religieuse, dans une Communauté de Charité, n'eut-elle pas depeine à
obtenir leurconsentement unanime, considérant à la lumière de la foi que
Dieu leur faisait une grande faveur en appelant une de leurs filles à
son service. Cet heureux privilège devait se répéter quelques années
plus tard dans la personne d'une des soeurs d'Émilie, Soeur Lavigne, des
Soeurs Grises de Montréal, qui n'ayant pû persévérer à notre
Providence pour défaut de santé, fut plus heureuse dans un autre essai
et se voua, comme son ainée, aux oeuvres de la charité
À
peine notre bonne soeur Joseph-Gabriel venait-elle de se consacrer à
Dieu par les voeux de religion - 24 mars 1908 - que l'obéissance la
désignait pour la mission sauvage de Lac Esturgeon, au Territoire du
Nord-Ouest. Elle y passa les cinq premières années de sa vie
religieuse et y remplit les fonctions obscures, mais doublement
méritoires de cuisinière, dépensière, boulangère, à l'exception de la
dernière année, où elle fut employée auprès des petits garçons de la
mission, avec, en plus, la buanderie. Ces différents travaux toujours
pénibles en eux-mêmes, l'étaient bien davantage dans une fondation
comptant à peine deux années d'existence, et manquant d'accessoires
pour l'exécution de tel ou tel emploi. Mais notre chère soeur n'en
sentait guère la peine; elle eût voulu se sacrifier encore davantage
pour le salut des âmes.
Cependant ses forces
s'épuisaient et ses supérieures majeures durent la rappeler pour
l'Hôpital Saint-Jean-de-Dieu où elle passa les 12 dernières années de
sa carrière religieuse, à des emplois mieux proportionnés à ses forces:
soin des malades à l'infirmerie des soeurs, compagne de la dépensière
durant six années consécutives, après lesquelles la maladiel'obligera à
des repos intermittents et lui fera remplir de petits offices, ça et
là, jusqu'à ce que la souffrance devenue intolérable, nécessitera un
repos complet.
Mais avant d'arriver à cette dernière
phase de son existence, arrêtons-nous aux vertus que cette chère soeur a
pratiquées d'une façon si admirable et dont le souvenir doit nous être
précieux. Partout et toujours, disent les soeurs qui ont vécu dans
son milieu, Soeur Joseph-Gabriel a manifesté la bonté de son coeur, son
amour pour les pauvres et les malades, sa condescendance aimable et
prévenante, son bon accueil pour tous. Nous avons déjà dit ce qu'était
son amour pour le travail, ajoutons que rien ne lui coûtait pour
rendre service et, par ses prévenances, elle allait même au-devant des
désirs de ses officières à l'égard desquelles notre bonne soeur se
montra toujours humble, soumise et d'humeur égale au milieu des
contrariétés.
Sa piété, autre forme de son dévouement,
lui faisait pratiquer la règle avec amour, sachant mettre de côté sa
satisfaction personnelle quand il s'agissait du devoir à accomplir.
C'est ainsi qu'un soir, une de ses parentes, religieuse, voulant
luiparler, notre soeur lui fit remarquer que l'heure de la récréation
étant passée, il n'était pas permis d'enfreindre le silence, et la pria
d'attendre au lendemain.
Charitable dans ses
conversations, elle s'observait si bien dès qu'elle s'apercevait de la
moindre infraction, elle s'empressait de désavouer sa faute en
déclarant sa culpabilité.
Reconnaisante pour ses
supérieures et ses officières, elle n'avait garde d'oublier celle qui
fut la première, en mission, à la guider dans les voies de la mission
St-François-Xavier, à qui elle écrivait, chaque année, à l'époque de sa
fête patronale,pour lui renouveler sa reconnaissance et le bon
souvenir qu'elle conservait de sa première mission au Lac Esturgeon.
Sa
tendre dévotion à la Sainte Vierge n'excluait pas celle qu'elle
portait au chef de la sainte famille, devenu son patron, et qu'elle
honorait de sa confiance. Aussi peut-on attribuer à ces augustes
protecteurs l'assistance marquée qu'elle en reçut à ses dernièrs
moments.
Dieu qui compte nos jours ici-bas et qui
considère plus la valeur que le nombre de nos oeuvres, avait résolu
d'appeler à lui sa fidèle servante. Atteinte depuis longtemps d'une
maladie que le traitement médical n'avait pû vaincre, elle décida,
endernier ressort, de se soumettre à l'opération chirurgicale, qu'elle
subit le 14 avril 1925. Malheureusement, ce moyen extrême n'eut pas le
succès espéré, car il suvint de graves complications qui enlevèrent
tout espoir. Le premier mai au soir, la malade revenue à notre
hôpital, demanda et reçut, la sainte communion avec une émotion
visible. La nuit qui suivit fut des plus souffrantes, mais le
lendemain, elle exprima de nouveau son ardent désir de communier en
même temps que les autres malades. La supérieure s'étant rendue auprès
d'elle l'aida à sa préparation, lui fit renouveler ses voeux et sa
profession de foi. À peine eut-elle reçu son Viatique céleste, qu'elle
demeura immobile et comme dans la contemplation d'un objet cher
qu'elle embrasssait de son regard tendre et recueilli.
L'heure
suprême approchait où notre chère soeur allait s'unir pour jamais à
l'Epoux des Vierges. La messe était finie et le déjeuner des soeurs à
peine commencé, quand on vint avertir la supérieure que la malade
touchait à sa fin. Quelques minutes plus tard, elle expirait si
doucement que c'est à peinesi nous avons pu saisir son dernier soupir.
Nous regrettions que sa soeur, religieuse des Soeurs Grises, ne fût
pas présente à ce moment, elle qui, auparavant, avait passé quelques
jours auprès de cette chère soeur à qui elle était si attachée.
Les
pieux parents assistèrent à son service qui eut lieu le 4 mai. Tous
deux ne cessaient d'exprimer leur reconnaisance à notre supérieure pour
les soins prodigués à leur chère enfant. Ils trouvèrent maintenant
leur consalation dans la pensée quecelle qui s'est donnée tout entière à
Dieu au printemps de sa vie, aura reçu un accueil favorable du
Souverain Juge au moment de sa mort. Tel est aussi le sentiment de
ceux et celles qu'elle a laissés ici-bas et qui la retrouveront au
ciel!
Qu'elle repose à jamais dans la paix du Seigneur».
Reproduit intégralement du Petit Journal de la Providence, Vol XXII, 1925, 24ème année
(pp 467-473)
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